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Photo du rédacteurPauline Quintanilha

"Il leur a volé leur innocence" : un homme condamné à 15 ans de prison pour viols et agressions sexuelles sur quatre mineurs

La Dépêche du Midi

Publié le 08/05/2024 à 07:07

Marie Lacombe


Après quatre jours de procès marqués par de fortes émotions et une tension permanente, le jury de la cour d’assises de l’Ariège a condamné Fabrice à 15 ans de réclusion pour les faits de viols qu’on lui reprochait.


"Ce que prétend Noé est vrai. Ce que prétend Quentin est vrai. Ce que prétend Louis est vrai. Ce que Léo prétend est vrai. Je regrette tout le mal que j’ai pu faire et je présente mes excuses les plus sincères." Plus que le verdict prononcé à 19 h 15 hier soir, c’est cet aveu de Fabrice des faits qui lui sont imputés qui a provoqué le soulagement chez les parties civiles du procès qui courait depuis jeudi 2 mai devant les assises de l’Ariège.


Une barrière a donc, semble-t-il, été franchie hier. Il faut dire que l’attitude du mis en cause jusqu’à mardi matin incitait plutôt à penser que rien n’avait changé chez lui, ce que n’ont pas manqué de faire remarquer les avocats des plaignants tout au long de leurs plaidoiries. "J’ai une impression mitigée, débute Maître Quintanilha, avocate de Quentin. Malgré la reconnaissance de ce matin, celle-ci est quand même tardive, même si vous me direz qu’il vaut mieux tard que jamais." L’avocate remarque le "regard et le verbe hauts" de Fabrice, "l’aplomb" de celui qui a "réponse à tout". Maître Pujo, sa consœur avocate de Noé, neveu de Fabrice, et de ses parents, admet un sentiment amer face aux dénégations de l’accusé, qui ne reconnaît pour son client qu’un "geste malencontreux et furtif" en dormant : "Il a eu 6 ans pour réfléchir à la gravité de ses actes et jusqu’à ce matin, on n’avait pas une larme, pas une réaction. Il leur a volé leur jeunesse, il leur a volé leur innocence !"


De sa voix claire et posée, Maître Billaud, défenseur de Louis et sa mère, établit un parallèle entre son client et Christophe Tison, auteur du livre "Mais il m’aimait" où le journaliste traite du sujet de la pédophilie qu’il a vécue, mais où l’agresseur semblait sincèrement l’aimer : "C’est une relation si complexe, où le mis en caisse a voulu voir une avance à ses propres désirs, où le besoin de tendresse de l’enfant est vu comme du désir." Toutefois, souligne-t-il, l’accusé n’a pas reconnu les faits, juste dit que ce que disaient les enfants était vrai : "Ce n’est pas une reconnaissance directe, assène-t-il. Tant que l’accusé restera dans le déni, tant qu’il continuera de dire qu’il aimait, qu’il ne reconnaît pas qu’il leur a fait du mal, on ne pensera qu’à un aveu de circonstance, il ne restera qu’un prédateur."



Maître Delrieu, représentant Léo et ses proches, appuie quant à elle sur le narcissisme de Fabrice, qui demande pardon aux victimes mais ramène ensuite aux amis et à sa vie qu’il a perdus : "Mais vous croyez qu’eux, ils n’ont rien perdu non plus ? Ça fait 4 ans qu’ils n’en dorment pas !", martèle l’avocate, qui souligne "l’humiliation" vécue par son client, obligé de se répéter encore et encore devant les instances judiciaires face aux mensonges de l’accusé. Tous, sans exception, étayent la douleur autant physiques que psychologiques de leurs clients, "victimes de stress post-traumatique comme les soldats qui reviennent traumatisés de la guerre", et la culpabilité de leurs proches : "Je veux que la justice leur explique qu’ils ne sont coupables de rien", conclut Maître Quintanilha.


Un mode opératoire contesté


Si eux ne sont coupables de rien, l’avocat général va quant à lui s’attacher à montrer en quoi les faits de viol aggravé et agression sexuelle aggravés sont caractérisés et mettent donc en jeu la responsabilité pénale de Fabrice. Le réquisitoire d’Olivier Mouysset est implacable, soutenu par la constance de la parole des victimes et les variations dans les déclarations de l’accusé qui avait mis en place "un mode opératoire rodé" pour attirer les enfants chez lui.


Qui plus est, Fabrice ne souffre d’aucune pathologie ou délire psychiatrique, rappelle le magistrat, mais présente bien une dangerosité criminelle qui le laisse dubitatif quant à un remords sincère de sa part. Raison pour laquelle l’avocat général requiert "une peine ne pouvant être inférieure à 15 ans", assortie d’une période de sûreté de 10 ans, en plus d’un suivi sociojudiciaire et d’une obligation de soins pendant 10 ans.


Face à l’argumentaire déployé par l’avocat général et la partie adverse, Maître Glock ne se démonte pas. "Je veux qu’on soit bien clairs, vous êtes les victimes, vous n’êtes pas les coupables, s’adresse-t-elle en premier aux adolescents et à leurs parents, mettant l’accent sur l’effraction qu’ils ont subi et qu’elle a aidé son client à reconnaître. Pour autant, elle dépeint aussi un procès aujourd’hui qui est le fruit de 50 ans d’évolution légale et sociale, où les concepts de sexualité et de protection des mineurs ont évolué après un éveil important sur cette dernière notion. Fabrice, décrit-elle, a grandi en ce temps-là, avec en arrière-plan un premier cercle familial permissif, presque malsain pour l’enfant qu’il était : "Quelles sont les barrières éducatives qu’on a pu donner à ces gamins ?", s’interroge-t-elle.


Une fois devenu adulte, Fabrice se serait retrouvé seul aux abords de la trentaine, s’enfonçant dans le cannabis et l’alcool quand ses amis construisaient leur vie de famille. "On ne me fera pas croire qu’il avait mis sur pied un plan élaboré pour attirer les enfants chez lui, dans ce squat amélioré. Il avait ce besoin effréné d’amour, de ne plus se sentir seul, et là il avait quelqu’un en la personne de Quentin", tente-t-elle d’expliquer, réprouvant les parents qui viennent "cracher sur ces années d’amitié": "ça ne tient pas debout, il n’avait rien prévu, n’avait rien vu arriver." L’avocate termine son plaidoyer en tentant de montrer aux jurés la part d’humanité en son client, avec "une souffrance qui existe" et qu’il n’est pas un monstre. Pour ponctuer son propos, Fabrice se met à pleurer et réitère ses excuses les plus profondes pour tout le mal qu’il a causé.


Cette plaidoirie semble avoir eu un écho chez les jurés, qui déclarent tout même coupable Fabrice de tous les faits qui lui sont reprochés. Toutefois, si le quadragénaire est condamné à 15 années de prison, elle sera effectuée sans peine de sûreté ; le suivi socio-judiciaire sera quant à lui de 6 ans.


Le coupable sera aussi interdit d’entrer en contact avec ses victimes, obligé de se faire soigner, interdit d’exercer toute activité ayant un contact habituel avec des enfants, et enfin inscrit au Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes.


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